Edito du Trait Dunois n°262 mars 2023
« L’inscription dans la commune humanité, crédibilité de notre témoignage chrétien »
Le temps de carême est un moment propice pour revisiter, rappeler ce qui fait l’essentiel de notre vie de baptisé, c’est-à-dire ce qui donne à lire notre vie à la suite du Christ et qui rend notre témoignage crédible. Le Concile Vatican II nous y invite lorsqu’il déclare : « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ ». La communauté des chrétiens ajoute le concile, « se reconnait donc réellement et intimement solidaire du genre humain et de son histoire ». Le pape François par son attitude et ses discours s’inscrit dans cette humanité commune. Le pape interpelle la communauté des chrétiens à prendre en charge l’humain. L’Eglise, dit-il, doit être un hôpital de campagne.
La commune humanité, qu’est-ce à dire ? Avant de donner un éclaircissement sur la réalité « commune humanité », constatons qu’il y a des tendances qui se dessinent dans la manière de vivre des chrétiens face à la société actuelle de plus en plus sécularisée. La première tendance c’est celle adoptée par les chrétiens que l’on peut appeler « des nostalgiques du passé ». Cette tendance prône un retour en arrière où l’Eglise serait comme jadis « une instance sacralisée » au-dessus de la société, qui norme et régule la vie dans toutes ses dimensions. Les cloches de nos églises en sont l’exemple vivant. La deuxième tendance c’est celle qui prône de se mettre en marge de la société pour ne pas se compromettre ; qui rêve d’une position contre-culture ? L’Eglise doit se situer à part, voire au-dessus de la commune humanité. Certains recourent à l’expression vestimentaire ou à d’autres signes distinctifs pour marquer cette contre-culture de mise à part. La troisième tendance c’est celle de l’inscription dans la commune humanité.
La commune humanité est cette relation qui se noue dans une expérience de rencontre avec autrui. Comme le disait le philosophe Emmanuel Mounier : « la personne ne se forme, ne se conquiert elle-même, ne subsiste que dans la relation avec l’autre personne…On dira, ajoute Mounier : « cette relation où l’humanité commune de l’autre se révèle, est celle de la rencontre authentique. La découverte de l’autre est l’expérience où j’apprends ce qu’est la personne, et en même temps qui je suis. C’est dans cette découverte de ce « toi » que j’apprends à connaître la personne, ma personne et Dieu l’un par l’autre ». Bref la commune humanité c’est l’expérience de la relation authentique interpersonnelle. Celle-ci suppose un vrai dialogue, une reconnaissance fraternelle, une prise de toutes les situations où l’entre- nous implique l’ouverture à l’humanité de l’autre et donne à l’autre l’accès à mon humanité.
L’accueil de l’humanité commune, dans chaque humain, à travers la rencontre, l’accueil de l’autre tel qu’il est sans préalable, sans coller sur lui un masque, voilà la nouveauté chrétienne que le pape François a remise en priorité dans ce qu’il appelle la pratique du dialogue.
Plus que jamais soyons le bon samaritain de nos voisins, de nos frères et sœurs dans la foi en Dieu. Lavons leurs pieds s’il le faut. C’est tout l’enjeu de la crédibilité de notre être chrétien. Bon Carême.
Père Tryphon ILENDA BASILA, Curé