Les Béatitudes, enseignement majeur de Jésus, proclamées en la fête de la
Toussaint, nous rappellent que vivre à la suite du Christ, c’est déjà goûter une vie
bienheureuse sur terre en étant humble, doux, juste, miséricordieux…
Nous n’espérons pas seulement la vie bienheureuse du ciel. Nous attendons déjà une vie
aussi heureuse que possible sur terre. Notre prière pour nos défunts, particulièrement
commémorés le 2 novembre, nous confronte à la mort, leur mort mais aussi la nôtre.
Et nous sommes invités à relire notre vie à la lumière des Béatitudes.
Il est toujours rude d’envisager notre propre mort. Cela est-il possible d’ailleurs ?
Il s’agit pourtant d’une clef essentielle de la sagesse pour cheminer dans la paix. Tout
d’abord en confessant notre foi et notre espérance : « Dieu n’a pas fait la mort, il ne
se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. » (Livre de la Sagesse 1, 13) Tant de
personnes perdent la foi devant la mort d’un proche. La Bible affirme que la mort est
une contradiction dans le plan de Dieu. Dieu veut la vie.
Rien n’est si simple pourtant et l’actualité nous oblige à nous interroger alors que
nous entendons parler d’un projet de loi pour légaliser l’euthanasie ou le suicide
assisté. La souffrance est par définition une épreuve éminemment personnelle. Il nous
faut entendre le souhait d’en finir ou que cette souffrance s’achève pour ceux que l’on
aime. La mort cependant ne concerne-t-elle que la personne qui meurt ? La question
était posée dans l’une des fiches sur quelques grandes questions de bioéthique
publiées par le diocèse il y a quatre ans : « …pour maximiser l’autonomie du mourant,
des voix demandent un nouveau droit : celui de choisir le moment ou les modalités de
sa fin de vie… Ce droit, personnel et individuel ne regarderait pas la société qui devrait
donc l’autoriser. »
Bien des questions se posent pourtant : « Comment penser l’accompagnement de
la fin de la vie en n’oubliant jamais l’interdépendance, la relation vitale entre biens
portants et malades ? La médecine, toujours plus centrée sur la technique ou les
progrès thérapeutiques s’intéresse-t-elle à l’accompagnement des malades lorsque la
technique devient impuissante à prolonger la vie ? La demande de mourir n’est-elle
pas résultante d’une sensation d’abandon ? Associée à une pénurie de soignants,
comment ne pas entendre une demande à abréger des souffrances inutiles ? Ne
risque-t-on pas de réduire la mort à une question économique ? Et de transformer un
“droit à mourir” en un “devoir de mourir” si la personne fragilisée en fin de vie se sent
inutile, ou être une charge (financière ou chronophage) pour la société ou la famille ?
Ne risque-t-on pas de pervertir la vocation du soignant ? Mais au fond, pourquoi
faudrait-il mourir vite ? »
Notons bien qu’il ne s’agit pas de vouloir prolonger la vie à tout prix : Le refus de
l’obstination déraisonnable dans les soins est inscrit dans la loi. Le « laisser mourir »
avec un minimum de souffrance est promu.
Que la fête de la Toussaint et la commémoration de nos fidèles défunts nous
donnent de nous interroger sur ces graves questions… dans l’espérance.
Père Yannick Coat